Synthèse sur l'état de conservation du GE

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popey-77
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Message par popey-77 »

Source : Ancge, 5 avenue des chasseurs 75017 Paris, le 20 mai 2008.



Publications sur l’état de conservation des espèces et / ou populations d’oiseaux d’eau



Les estimations comptables internationales publiées sont le fait de 2 structures, BirdLife International et Wetlands International, qui se basent généralement sur les mêmes données de terrain (obtenues majoritairement par les réseaux LPO ou ONCFS en France par exemple), avec, ensuite, des systèmes d’extrapolation des chiffres totalement arbitraires et différents (d’où les variances). BirdLife International qui publie tous les 10 ans à l’échelle de l’Union européenne s’appuie aussi sur les données de Wetlands International produites tous les 4 ans, à l’échelon mondial et des aires de répartition des populations d’oiseaux d’eau.

Pour Wetlands International, on transpose les résultats des recensements hivernaux en couples reproducteurs puis on affecte à chaque espèce un coefficient multiplicateur arbitrairement décidé (3) qui permet de produire un chiffre estimatif pour chaque population de chaque espèce.

Quand les données concernent un nombre d’individus (et non de couples), le coefficient multiplicateur est divisé par 2 (1,5).

Plus les données du recensement sont importantes, plus l’estimation est élevée. L’évolution numérique historique de ces estimations permet de déterminer des tendances : favorable, stable, défavorable selon, en principe, que les chiffres montent, stagnent ou descendent.

Plusieurs points de faiblesse sont à dénoncer dans la démarche :



:arrow: Plus on observe, plus on compte, plus les recensements sont bons et plus les estimations devraient être élevées. Les tendances devraient alors logiquement apparaître favorables alors que c’est en fait l’effort de recensement qui a été plus grand et pas nécessairement le nombre d’oiseaux présents, quoique cela ne soit pas toujours vrai.

Des mécanismes de pondération, arbitraires eux aussi, sont donc introduits.

Exemple du vanneau : Wetlands International 2002 – Europe – 2,8 à 4 millions d’individus. Decreasing.

Wetlands International 2006 – Europe - 5,1 à 8,4 millions d’individus. Decreasing (« on basis of extension winter sample survey in France »). On a pondéré à l’extrême ! Alors qu’en valeur absolue, les estimations sont plus que doublées. Sur quelles bases a-t-on pondéré ?



:arrow: Pour certaines espèces, l’observation visuelle est efficace. Pour les oies par exemple, les estimations des populations hivernantes peuvent apparaître fiables d’où la concordance des avis sur une tendance démographique favorable. Pour des espèces cryptiques comme la bécasse des bois, les bécassines ou les rallidés, c’est totalement différent. On frôle même souvent le charlatanisme.

Avec quelques centaines d’individus observés pour la bécassine sourde sur tout le Paléarctique occidental, on s’interrogeait en novembre 99 à l’AEWA sur l’interdiction de la chasse de l’espèce avec des estimations d’effectifs délirantes : entre 25.000 et 1 million d’individus par exemple pour Rose et Scott en 1997 (Wetlands International).

Fourchette aberrante, marge d’erreur impressionnante (97,5%), révélatrice de l’absence totale de connaissance réelle.

Une amélioration notable est venue par les prélèvements réalisés par les chasseurs français et relevés par l’ONCFS : 44.650 individus pendant la saison 98 – 99. Depuis, on a rectifié à la hausse les estimations de population mais sans jamais avoir rien observé de plus, notamment pour la fourchette basse. Un constat inquiétant qui impose réflexion sur la démarche.



:arrow: Les états de population peuvent encore être à géométrie variable selon la façon dont on les présente et l’aire de répartition prise en compte.

Pour illustrer ce propos, le canard chipeau est idéal.

Estimation de population en hausse croissante depuis plusieurs années par Wetlands International (60.000 individus – Increasing – Wetlands International 2006).

La hausse des effectifs serait de plusieurs % chaque année, 6 à 10 %.

Pourtant, en 2002, l’estimation de Wetlands International était déjà à 60.000 individus et la tendance croissante. Bizarre que cette évolution favorable se fasse en chiffre constant, en dépit de 6 à 10 % de plus à chaque saison.

Plus surprenant encore, les associations protectionnistes françaises considèrent l’espèce en mauvais état de conservation en France car les effectifs de couples reproducteurs nationaux baissent. Cette baisse a été analysée. Elle est la conséquence de l’utilisation par l’agriculture des bords d’étangs aujourd’hui, épargnés autrefois, où l’oiseau se reproduit.

Néanmoins cette baisse ne prend pas en compte le fait que le 1er couple de chipeau reproducteur en France a été observé en 1935. Avant, il n’y en avait aucun !

Donc baisse par rapport à quoi ?

Baisse par rapport à un pic dans les années 60 ou hausse par rapport à l’apparition du 1er couple ?

Tout le débat est là. D’autant qu’à chaque changement de zone géographique comptable de référence, tout est remis en cause.

Aujourd’hui, les oies voient leurs effectifs grimper chaque année. Etat de conservation très favorable donc. Mais quand le seuil maximum sera atteint, les effectifs baisseront, inexorablement (avec ou sans chasse, comme déjà vécu avec la bernache cravant).

L’état de conservation va-t-il alors devenir défavorable avec des effectifs énormes ?

Ainsi une population peut être en état de conservation favorable avec 10.000 individus et se retrouver en situation défavorable 15 ans plus tard avec 20.000 individus parce qu’elle aura connu un pic à 25.000 entre temps.



:arrow: Ensuite, des seuils numériques de référence et de classement sont arbitrairement fixés.

Pour Wetlands International, une population inférieure à 10.000 individus est classée A ; de 10.000 à 25.000, elle est classée B. Et cela jusqu’à E, population comptant plus d’un million d’individus. Un choix fait et imposé par l’homme, pour des raisons techniques et arithmétiques.

Un tel classement peut avoir des conséquences. Par exemple, l’AEWA reprend en catégorie A1c les populations comptant moins de 10.000 individus et interdit systématiquement leur chasse, toute perturbation à leur égard et leur détention, quelle que soit la nature de l’espèce.

Ces estimations et ces fourchettes arbitrairement fixées ne sont donc pas anodines.

Pour BirdLife International, ce sont les variations d’estimations qui ont une incidence.

Un écart en plus ou en moins de 0 à 19 % (vis-à-vis de l’estimation précédente) entraîne un classement de tendance de plus ou moins 1, et cela par tranche de 20 % (arbitrairement décidé) jusqu’à 80 %. Un raisonnement et une logique, ici encore, purement arithmétiques. Pourquoi de 20 en 20% et pas de 10 en 10 par exemple ?

:arrow: Enfin, BirdLife International s’intéresse aux oiseaux présents sur le territoire de l’Union européenne tandis que Wetlands International estime les populations où qu’elles soient, par zone géographique. A contrario, Wetlands International ne se préoccupe que des oiseaux fréquentant les zones humides alors que BirdLife International vise tous les oiseaux de l’espace communautaire.



:arrow: A noter aussi l’existence de publications à dimension nationale. Leur absence de valeur biogéographique est évidente. N’étant pas en adéquation avec les aires de distribution des oiseaux d’eau, elles n’ont qu’une vocation administrative voire budgétaire. Elles reprennent d’ailleurs, à un niveau plus modeste, la démarche initiée par BirdLife International qui dresse un inventaire des oiseaux présents sur le territoire communautaire afin de coller à cette entité territoriale et de profiter de ces financements. De telles démarches peuvent induire des erreurs d’appréciation significatives (pour les décideurs) sur la situation réelle de telle ou telle population d’oiseaux d’eau, l’aire de répartition de chacune d’elle ne correspondant pas nécessairement aux découpages institutionnels géopolitiques.



:arrow: Quelques remarques sur certaines espèces emblématiques :



- Barge à queue noire (Limosa limosa) :

L’espèce est divisée en deux populations. La première, continentale, Limosa limosa limosa, se reproduit aux Pays-Bas et connaît les difficultés de productivité que l’on sait (réduction des habitats, prédation). La chasse en France n’est d’aucun effet sur cette population compte tenu de ses dates et lieux de migrations (juin-juillet et mars-avril, marais arrière littoral voire intérieur).

L’autre population, Limosa limosa islandica, ne connaît pas de difficulté démographique. Elle arrive plus tard en France et y est donc chassée. Très modérément toutefois.



- Eider à duvet :

L’espèce eider à duvet est composée de multiples populations toutes en état stable ou increasing, à l’exception de la population de la mer Baltique et de la mer des Wadden.

3 causes à cette situation particulière : un virus qui atteint les mâles et provoque un déséquilibre dans le sexe-ratio, donc une baisse de productivité, la surpêche des moules à des fins commerciales qui provoque une réduction de la ressource trophique, les pollutions par hydrocarbures. La chasse n’est pas en cause.



- Oies cendrées :

Le retour précoce des oies cendrées en France cette année est dû à une réduction des zones d’accueil en Espagne (production de fraises sur le Guadalquivir) et à la sécheresse conséquente à la faible pluviométrie mais surtout à l’irrigation et aux pompages pour les cultures.

Les oiseaux sont donc partis plus tôt à cause du manque d’eau et de nourriture.



- Huîtrier-pie :

L’état de conservation de la population du Nord et de l’Ouest de l’Europe est considéré défavorable (pas les autres populations). La cause : la baisse des effectifs néerlandais en bord de mer des Wadden (de 266.000 individus estimés en 1980 à 177.000 en 1990) à cause du dérangement par l’homme (réduction du temps disponible pour l’alimentation) : tourisme, baignade, pêche à pied, ….

Le fait de chasser ces oiseaux en France en février ne changera rien à ces causes de dérangements massifs. Les prélèvements sont aussi très faibles.



- Vanneau huppé :

Le problème de cette espèce n’est pas la chasse. L’enquête en cours de l’ANCGE est en train de le prouver comme la précédente (avec celle de l’ONCFS) a démontré la sous-estimation manifeste des effectifs.

Le problème du vanneau est celui de la fauche des foins trop précoce en été (destruction des couvées, jeunes sans abri, …) et la disparition des prairies à pâturage.

Une évolution de l’espèce semble toutefois se faire sur les zones cultivées en hiver. Ce phénomène a pu stopper voire compenser la baisse affirmée par certains des effectifs mais le recul sur des estimations fiables n’est pas encore suffisant pour démontrer cet impact et cette adaptation.

L’espèce est en réalité très peu soumise aux prélèvements cynégétiques (voir article La Sauvagine).



- Bécassines, râle d’eau, poule d’eau :

Aucune estimation tirée de dénombrement visuel n’est crédible pour ces espèces.



- Chevaliers :

Soumis à une faible pression de chasse. Réelles difficultés : l’habitat et notamment la surfréquentation humaine des rivages de la mer des Wadden.



Source : Ancge, 5 avenue des chasseurs 75017 Paris, le 20 mai 2008.
tartarin75
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Message par tartarin75 »

Protéger la pie de mer? je ne m'en remettrais pas.... :cry: :cry: :oops:



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