Ce brocard, je l’avais reperé, photographié, filmé à des distances raisonnables de tir…
Mais tout a changé quand j’ai décidé de le prélever…
Pendant une semaine, toutes mes sorties du matin et du soir m’ont permis de le voir à chaque fois, trop loin, en plein découvert dans une grande prairie, et toutes mes tentatives d’approche se sont soldées par un échec….
Jusqu’à ce fameux jour….
8 heures du soir.
Je gare la voiture, je m’équipe, carabine, jumelles, canne de pirsch et sac à dos.
Et j’aborde ma fameuse prairie par une trouée dans la haie qui borde le fond de cette prairie.
A ma droite un maïs, séparé de la prairie par un fossé encombré de roselières.
Sur ma gauche, la haie se prolonge sur une centaine de mètres pour aboutir à un bois qui forme la deuxième branche du U encerclant la prairie. C’est de ce bois que sort régulièrement ce brocard, et il n’est pas le seul…
Car, lorsque je jette un œil, il y a un monde fou au gagnage !
A ma droite, il y a un jeune daguet tranquillement occupé à brouter…
Et je compte quatre chevrettes sur ma gauche…
Mais pas mon brocard…
Je suis à bon vent, naturellement, et j’attends, immobile dans ma haie, appuyé contre le tronc d’un vieux saule.
Un quart d’heure se passe, tandis que j’observe tout ce petit monde aux jumelles…
Soudain, je vois la chevrette la plus à gauche, relever brusquement la tête et fixer la lisière du bois.
J’attrape les jumelles et je balaye la zone indiquée par la chevrette, qui est toujours dans la même position…
Rien….
Toujours rien…
Puis une tache rouge apparaît sur la lisière et un brocard sort lentement dans la prairie.
Jumelles…
C’est bien celui que je cherche.
Il est loin, environ à 200m. D’abord, il commence par brouter un peu, puis s’intéresse manifestement à la chevrette. Il s’en approche, le cou tendu, sur la pointe des sabots…
Tout ça ne fait pas mon affaire, car je pense que le brocard va rester avec la chevrette dans cet angle formé par la haie et le bois.
Impossible d’approcher en plein découvert.
Donc, je repasse derrière ma haie, et j’avance dans leur direction à l’abri des regards, protégé par les buissons. J’atteins une légère trouée et je jette un œil.
Ils sont à une soixantaine de mètres.
Je déplie ma canne de pirsch, je descends la carabine de l’épaule et …..... je n’ai pas le temps de faire autre chose, car le brocard se précipite brusquement vers la chevrette, qui démarre à son tour, et les voilà qui se poursuivent au milieu de la prairie.
Caramba ! Encore raté !
Maintenant ils sont tous les deux au centre de la prairie, en train de brouter, largement à 300m.
Alors, j’attends…
Quoi faire d’autre ?
Soudain, je vois mon brocard relever brusquement la tête, et fixer un point sur ma droite, vers le maïs.
Coup de jumelles.
Bien sûr, c’est le petit daguet…
Je l’avais complètement oublié, celui là…
Je vois le brocard, tête haute, s’avancer lentement vers le daguet, puis brusquement accelérer pour prendre le galop, tandis que le daguet fait un demi tour sur place pour foncer dans le maïs où ils disparaissent tous les deux.
Le daguet chassé, mon brocard va revenir…
Vite, vite je repasse derrière ma haie, et je me précipite (en silence quand même
) pour me placer à l’angle du maïs et de ma haie, complètement à droite, endroit que j’estime stratégique pour intercepter le brocard à son retour dans la prairie. J’y crois si fort que j’ai déjà déplié ma canne de pirsch.
Après une courte attente, je vois le brocard sortir du maïs, à une trentaine de mètres de moi.
Il est très énervé et donne à plusieurs reprises de coups de tête dans l’herbe…
J’ai déjà épaulé et je le suis dans la lunette, mais il n’arrête pas d’avancer….
Je donne un coup de sifflet, le brocard s’immobilise tête haute et je tire…
Dans la lunette, je le vois sauter en l’air, puis foncer au maïs, à une soixantaine de mètres, en sautant le fossé de roseaux…
Mais je suis sûr de ma balle et je vais sans inquiétude au point de tir, d’où je n’ai plus qu’à suivre les traces de sang qui me conduisent au brocard couché dans son dernier bond dans le maïs…
Je l’ai « veillé » pendant un bon quart d’heure
, avant de me décider à le baguer, à le sortir du maîs, à le vider et à le ramener à la voiture dans mon sac à dos….
C'est lui: