J'étais vieux, j'étais moche, j'étais con

La chasse réserve toujours des moments drôles, insolites, émouvants ou palpitants. Racontez ici vos plus beaux souvenirs.
white hunter
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Message par white hunter »

Bon, je m’en doutais un peu, quand même : un fond de conscience traverse encore l’homme vieillissant. Et j’étais borgne. Mais un peu de vie s’agitait en moi, et un crime pour fêter ça, ça le valait bien. J’y suis allé. A la Pierre du Finit. En 12 ans, je n’avais jamais pris ce poste. Prendre est le mot qui convient.







La veille, pour tester jenesaisquoi, je suis allé vérifier ma 9.3 à 200 mètres, et une autre arme ou deux. Toujours 15 cm trop bas, ce 9.3… J’ai ajouté 7 clics haut. 7 x 0.7 cm x 2. J’étais à – 5 cm à 200 mètres, en théorie, en tous cas (balle corrigée). A la Pierre du Finit, j’ai dû défendre mes droits, car deux chasseurs l’envisageaient aussi avec insistance. Invités, sociétaires ? Je ne sais pas. N’allez pas croire que je saurais des choses. Ça se saurait.



..



J’ai eu envie de pleurer d’abord un peu en voyant deux chamois fuir vers la vallée. Un bouc au moins parmi les deux. Des touristes casqués montaient de la vallée plein axe Bataillouse, une cordée jouait à la montagne en venant de Cabre ; quatre ou cinq sportifs descendaient du sommet. Et tous devaient penser, à chaque tir, que la chasse, il faut arrêter ça. Massacrer des bêtes… Mais deux chamois qui n’ont d’autre choix que de filer vers le bas et vers le bois, c’est comme une panne de bandaison.



..



Bref, j’émerge du brouillard, tel le Peyre Arse des brumes. Quelques tirs retentissent. Impossible avec ma vue de merde de repérer les tireurs. Bien sur, on n’a pas de talkie walkie. C’est cher. Deux bichettes tomberont sous les balles d’invités sur les hauteurs, à droite de la première image. Je rêvasse.



..

Bataillouse tout petit, tout envahi



Et je sursaute. Une harde apparait, de 6 ou 7 bêtes à 120 m. Un beau daguet mène la danse. Elles disparaissent dans les ruisseaux, réapparaissent. 150 mètres. Mon cœur bat. Un peu. Le réticule se pose sur le coffre du daguet ; ma carabine est sur mon sac, mon sac sur un rocher, le rocher sur la montagne où est le daguet. Immobile. Comme au stand. A part que je ne troue pas la cible, l’animal n’a aucune réaction.

Le monde stable sur lequel j’essaie d’être debout vacille. Le daguet se trouve soudain environné de biches, bichettes, faons peut-être. De sa corpulence il dépasse largement. J’hésite à tirer encore. Et je tire son cou : ne pas risquer de blesser un autre animal. Cette fois, il s’enfuit, en tête au grand trot. Je pourrais lui envoyer les deux dernières balles, mais je ne comprends rien. Et je ne tire pas. Un autre chasseur tire.



Je vais sur l’anschuss, ou à peu près, sans rien trouver. Un chasseur que j’y retrouve me dit que j’aurais du tirer encore, car tout est open (toutes les classes). Maman ! Je fais quoi ici ?

Je rentre vite, pour des tas de raisons. Mais j’ai appris avant que la troupe laissait du sang. Comme les sangliers sont signalés, je reporte au lendemain la suite. Mauvaise nuit.

Et retour au lever du jour sur place. Je serre la main du chien, un labrador, ou au moins d’argent, et caresse un peu le maître, pour bien montrer que les bêtes, je connais ça. Et c’est parti pour 4 ou 5 km pentus. Nous échangeons quelques propos avec Canouille, mais assez vite le souffle me manque et je laisse 100 mètres d’avance au canidé et à son serviteur. Il suit la piste de la bichette tuée et trainée hier matin, puis celle de la harde comportant l’animal blessé, malgré la pluie de la nuit, qui on le sait bien, n’arrête pas le pélerit. Il s’assoit lorsqu’il voit la harde, Canouille ! Car il n’a pas le droit. Le grand daguet pète la forme et ne saigne pas, ou plus. Mon cœur s’envole. Difficile de détailler dans le reste du groupe. Je me sens lavé, un peu.

La descente est un peu dure. Je vérifie ma carabine à 230 mètres. Je rate la cible ! Mystère. Ai-je fait les clics dans le mauvais sens ? Diane me déteste-t-elle ? Y a t'il une vie avant la mort ?





..



Mon mauvais tir avec Bataillouse en arrière-plan ; le lendemain avec Canouille
Alexis43
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Message par Alexis43 »

:mrgreen: t,1;op c1:lap

Que dire de plus devant de tels récits dans lesquels se côtoient avec grande intelligence poésie et modestie, l'amour de la chasse, du pays, du gibier, des hommes et aussi la technique, la franchise du loupé...bref, tout ce que devraient essayer de comprendre nos détracteurs pour mieux nous comprendre.

Heureusement que tu existes!

8)
michel39
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Message par michel39 »

Rater juste à côté du Téton de Vénus… C'est peut être que tu louchais trop sur ta droite… !



Beau récit WH . Encore bravo.



Mais je pense aussi que tu devrais peut être affiner tes ciblages et tes réglages… Et être plus attentif quand tu cliques…!!!



De mon côté, je me refuse encore et toujours a tirer au delà de 100/120 mètres.



Continue de nous régaler avec ta prose l'Ami.
infovert
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Message par infovert »

@white hunter wrote:...

Un autre chasseur tire.

...

c'est tout ce que tu écris sur ce "détail" ?



le chasseur en question est le traqueur habituel à qui il faudrait greffer un cerveau.

il a tiré quand la biche, les deux faons et les deux bichettes entouraient le daguet.

il a "tiré dans le tas d'un peu loin, deux fois parce que l'on avait toutes les classes de tir autorisées".

l'animal blessé a arrêté de saigner mais n'est pas guérit pour autant.

je ne pense pas que ce soit le daguet, encore que la vérification de la carabine de WH devrait nous en dire un peu plus mais il y a bien un animal qui sent bizarre dans le lot, c'est Canouille qui le dit.

ça ne fait que le 5ème blessé de la saison pour le "chasseur" en question.
yanosh
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Message par yanosh »

Salut,

Un bien beau récit de WH, comme d'habitude...

Et toujours aussi bien documenté t,1;op .

A propos,une question me taraude depuis un moment,de quel animal ou gibier peut on rapprocher le Chamois gustativement ?



A+++
white hunter
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Message par white hunter »

Michel, là-haut, si je tirais seulement en dessous de 100 mètres, je n'aurais tué qu'un chevreuil en 12 ans, je crois. Peut-être une biche aussi, au 270 W qui vient de resurgir dans ma mémoire ...



En milieu steppique et/ou montagnard,on tire loin.
infovert
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Message par infovert »

en 15 jours, 212, 212, 216, 163, 109, 150 et 245m.

le faon de 54kg à 109m, j'ai cru qu'il allait me marcher dessus tellement que je ne suis pas habitué à ce qu'ils viennent me voir de si près.



188m de moyenne sur les 50 derniers grands gibiers tués.
michel39
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Message par michel39 »

Je sais bien WH, je sais.

Je parlais de cela (les distances de tir) juste pour dire mon admiration et mon envie de pouvoir tirer plus loin.

Je ne remets absolument pas en question la légitimité et la nécessité des tirs à 200 mètres en montagne et sur des animaux qui défendent bien leur peau en ne se laissant pas approcher comme on peut approcher un chevreuil en foret ...
white hunter
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Message par white hunter »

Un bipied Harris, et tu gagnes 100 m d'efficacité. Et 100 + 100, ben ça fait 200. Un poil d'entrainement, pour trouver vite la bonne position. Mais à peine.
infovert
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Message par infovert »

pourquoi s'obstiner alors à emmener ta 9,3 dépourvue de bipattes ?

ta 7x64 serait plus à l'aise.

une 243 te siérait à merveille mais même sur ton lit de mort ...
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