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LES CARTOUCHES SPECIALES BECASSE
Comme chacun le sait, le tir de la bécasse s’effectue généralement dans des conditions très sportives et souvent de très près sur des oiseaux à la rapidité de vol surprenante.
Le milieu dans lequel évolue la mordorée est forcément encombré dans la mesure où l’oiseau recherche sa nourriture dans des secteurs humides et sur des sols à fort coefficient humique, ce qui suppose une végétation dense qui piège ses propres rémanents et ceux des arbustes et arbres voisins.
Cet environnement oblige des tirs extrêmement rapides à travers les brindilles et les branches, avant que notre bel oiseau ne soit dissimulé au regard par les frondaisons.
Tous ces paramètres conditionnent la structure même des munitions propres à stopper la fuite de notre gibier dont la vitesse angulaire de déplacement en vol laisse pantois.
C’est ainsi que les manufacturiers se sont penchés sur de vieilles recettes qui consistent à obtenir, à courte distance, des gerbes de plombs larges et homogènes qui ne laissent pas de trous engendrant des coups creux.
Des artifices de dispersion des plombs ont été imaginés afin que la gerbe, dès la sortie du canon, commence à occuper une surface frontale maximum quelle que soit le reforage du canon. En effet, il n’est pas rare de voir chasser la bécasse avec des armes adaptées à la chasse en plaine, chaque chasseur ne disposant pas obligatoirement d’un fusil bécassier.
Le chokage des canons, fréquemment full et demi, produit des gerbes relativement serrées, il convient donc de pallier cet inconvénient en agissant au niveau du bourrage de la munition, du poids de la charge de plombs et de la taille de ces derniers. Une vitesse élevée d’une gerbe de plombs de faible grosseur offre une dispersion nettement supérieure à une gerbe de gros plombs projetés à vitesse normale.
Par ailleurs les bourres grasses en feutre produisent des gerbes nettement plus larges que celles où les plombs sont maintenus dans un container en plastique ou autre. Cependant, l’écartement des projectiles n’est pas toujours suffisant pour couvrir correctement cette cible fugace.
On a donc placé, dans les premiers temps, un croisillon de carton sur la bourre afin de partager la charge des plombs en quatre parties égales. Ce stratagème, suivant la nature propre de chaque canon, n’a pas toujours donné satisfaction, loin s’en faut !
Un autre système, l’ARX, a été imaginé. Il s’agit d’un container muni de sortes d’ailettes chargées de provoquer la rotation de la gerbe à la sortie du canon assurant ainsi une répartition des plombs d’une largeur très généreuse.
Un cône tronqué placé directement sur la bourre, pointe en l’air, agissant comme un coin sur la base de la charge de plombs est également mis en œuvre par certains manufacturiers dans le but, également, d’accélérer la dispersion des projectiles.
Tout comme pour le croisillon, les résultats ne sont pas toujours à la hauteur des espérances avec tous les fusils. Cependant, avec certaines armes, l’efficacité est très satisfaisante.
Il est vrai qu’en matière de balistique interne et externe des armes à feu destinées à la chasse, et particulièrement des fusils à canons lisses, il est possible de connaître des variations importantes d’une munition à l’autre. C’est pourquoi il convient de toujours faire des essais avec plusieurs sortes de cartouches, avant de s’aventurer sur le terrain de la chasse, c’est une question d’éthique !
En dehors des artifices de dispersion, il existe aussi la variation géométrique des projectiles pour engendrer une large répartition de la gerbe.
Les plombs sphériques sont auto-stables et ont tendance à suivre des trajectoires régulières.
En écrasant les plombs jusqu’à les rendre légèrement discoïdes, on modifie complètement leur comportement dès qu’ils subissent la résistance de l’air à grande vitesse, il en est de même avec des plombs cubiques. Certains chargements sont encartouchés avec de tels projectiles, ils ont leurs adeptes.
Ceci dit, les cartouches « dispersantes » présentent des centres de gerbes dégarnis lorsqu’elles sont tirées dans des canons rayés supra ou autre. Ceci est parfaitement matérialisé dans les présentations de fusils pages X, Y et Z dont les essais de tirs ont été réalisés avec une munition chargée avec des plombs « disco », il suffit de considérer les pourcentages d’atteintes dans le cercle central de 54 cm de la cible utilisée.
Afin de matérialiser les différences existant entre certaines de ces munitions, j’ai procédé à des tirs à la distance de 12 mètres qui correspond assez fréquemment à celle rencontrée en sous bois dense.
L’arme utilisée est un fusil mixte muni d’un canon de 60 cm reforé full choke. Ce genre d’arme n’est pas un fusil bécassier, au sens où on l’entend généralement, mais est très utilisé pour la chasse au bois du grand comme du petit gibier.
C’est donc à ce type d’arme ainsi qu’aux fusils classiques adaptés au tir de plaine que sont destinées les munitions équipées de disperseurs dont nous pouvons apprécier les effets sur les cibles obtenues.
Jean – Claude TOLPHIN.
POURCENTAGES D’ATTEINTES POUR LES CARTOUCHES TESTEES.
La cible considérée comporte deux cercles, l’un de 76 cm et l’autre de 54 cm.
TUNET CROISILLON :
467 plombs n° 8 pour 29,83 g.
Nombre de plombs hors du diamètre de 76 cm : 17 ; % d’atteintes de la cible: 96,36 %
Nombre de plombs hors du diamètre de 54 cm : 54 ; % d’atteintes du cercle central : 84,79 %
TUNET SUPER DISPERSANTE :
408 plombs n° 7 pour 35,67 g.
Nombre de plombs hors du diamètre de 76 cm : 0 ; % d’atteintes de la cible : 100 %
Nombre de plombs hors du diamètre de 54 cm : 3 ; % d’atteintes du cercle central : 99,26 %
VOUZELAUD DISPERSANTE ( plombs disco)
473 plombs n° 8 pour 32,01 g
Nombre de plombs hors du diamètre de 76 cm : 3 ; % d’atteintes de la cible : 99,37 %
Nombre de plombs hors du diamètre de 54 cm : 44 ; % d’atteintes du cercle central : 90,06 %
KETTNER SPECIALE BECASSE :
639 plombs n° 9 pour 32, 09 g
Nombre de plombs hors du diamètre de 76 cm : 02 ; % d’atteintes de la cible : 99,69 %
Nombre de plombs hors du diamètre de 54 cm : 41 ; % d’atteintes du cercle central : 93,27 %
VERNEY CARRON OPEN ARX :
624 plombs n° 9 pour 31,95 g
Nombre de plombs hors du diamètre de 76 cm : 23 ; % d’atteintes de la cible : 96,31 %
Nombre de plombs hors du diamètre de 54 cm : 108 ; % d’atteintes du cercle central : 79,00 %
MANUFRANCE ARX :
450 plombs n° 7 pour 33,53 g
Nombre de plombs hors du diamètre de 76 cm : 08 ; % d’atteintes de la cible : 98,22 %
Nombre de plombs hors du diamètre de 54 cm : 49 ; % d’atteintes du cercle central : 87,33 %
France MUNITIONS
571 plombs n° 9 pour 32,4 g
Nombre de plombs hors du diamètre de 76 cm : 09 ; % d’atteintes dans la cible : 98,42 %
Nombre de plombs hors du diamètre de 54 cm : 76 ; % d’atteintes du cercle central : 85,11 %
FIOCCHI DISPERSANTE
442 plombs n° 8 pour 34,36 g
Nombre de plombs hors du diamètre de 76 cm : 05 ; % d’atteintes dans la cible : 98,87 %.
Nombre de plombs hors du diamètre de 54 cm : 39 ; % d’atteintes du cercle central : 90,04 %
A la lecture de ces résultats, il ressort que les performances des munitions dites dispersantes sont bien adaptées au tir rapproché en sous bois. Cela est d’autant plus flagrant que le nombre de plombs situés dans la zone intermédiaire qui matérialise les deux cercles ( 76 et 54 cm ) est important tout en réservant un maximum d’atteintes à l’intérieur du cercle de 76 cm.
En ce qui concerne le numéro de plomb le plus favorable, il semblerait que le 9 soit le plus indiqué dans la mesure où les charges de 32 g comportent tout de même, dans la majorité des cas, plus de 600 projectiles, qui laissent moins de parties dégarnies au sein de la gerbe.
Ainsi que l’on peut le constater sur les photos, une munition classique tirée dans les mêmes conditions, avec une gerbe de 20 à 22 cm de diamètre, risque, dans le meilleur des cas, de faire manquer le gibier et dans le pire des cas, de le pulvériser, ce qui n’est pas le but de la manœuvre !